Camille ALAPHILIPPE (1874- après 1941 ?) – « La Baccanthe »

L’Art en Mouvement

Exposée pour la première fois au Salon de 1913 dans sa version en plâtre, « La Bacchante » est un modèle que Camille Alaphilippe affectionne tout particulièrement et ne cessera de montrer tant à Paris qu’en Algérie.
Elle est une des œuvres qui a satisfait son auteur tout au long de sa carrière.
Il exposera sa version en bronze au Salon des Orientalistes en 1921 et 1928 ;

Bien que conçu avant la première guerre mondiale, « La Bacchante » incarne, jusque dans l’entre-deux guerres une forme de sculpture avant gardiste typique de l’Art Déco des années 30.

La « Bacchante » est une synthèse parfaite entre ces deux pôles. Elle est encore animée par la dynamique de l’Art Nouveau, mais son dépouillement extrême et ses formes lisses montrent une nouvelle orientation de la sculpture.

Dans cette œuvre, Alaphilippe revient à la représentions du corps nu et à un sujet mythologique qui ont tant marqué ses années de formation à l’École des Beaux-Arts de Paris et à l’Académie de France à Rome.

Pour autant, elle est profondément ancrée dans une démarche moderne. Le corps représenté en mouvement, bien qu’on y trouve encore trace de l’élégance académique, est vivifié par l’art de la Danse. (Isadora Duncan a-t-elle aussi inspiré Alaphilippe ?)

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Par ailleurs, la violence et la sensualité exacerbée de la représentation du corps féminin nu s’inscrivent elles aussi dans l’imaginaire orientaliste d’un monde exotique luxurieux et contribue à son succès à Alger pendant plusieurs années.

Alors qu’elle n’était pas conçue comme une œuvre orientaliste, elle l’est devenue dans son second contexte d’exposition et d’interprétation.

 

« La Bacchante » dit aussi « Le pas de danse » ou « L’Amazone » ou « La Danseuse aux thyrses » (symbole de prospérité, de fertilité et d’hédonisme chez les grecs anciens).

 

  • Épreuve en bonze à patine brun à fond vert
  • Fonte au sable vraisenblablement par la fonderie « Patrouilleau »
  • Socle en marbre vert veiné
  • Porte un cartouche « C. Alaphilippe »
  • Hauteur sans le socle : 91 cm

Camille Alaphilippe est né à Tours le 13 août 1874.
Il suit les cours de l’école des Beaux-Arts de Tours, avant de rejoindre à 20 ans, celle de Paris. Il intègre alors l’atelier du sculpteur Louis Ernest BARRIAS.
Il obtient le Prix de Rome en 1898 pour son interprétation de « Caïn fuyant le péché »
Il participa au Salon de la Société des artistes français pour la première fois en 1898
Après un séjour de 4 ans à la Villa Médicis, il s’installe à Paris où il mène une carrière de statuaire en parallèle d’un travail de sculpteur au sein de la manufacture de grès d’Alexandre Bigot à Mer (Loir et Cher).
La production de Camille Alaphilippe est très souvent reliée au mouvement de l’Art Nouveau.
Son travail dans l’usine de grès de Bigot lui permet de collaborer avec divers architectes dont Jules Lavirotte, un des architectes les plus excentriques de l’Art Nouveau parisien (Hôtel Céramic, av de Wagram à Paris…..)
Il est un des acteurs majeurs de l’utilisation artistique du grès émaillé. Cette matière qui « réconcilie l’art et l’industrie et abolît les hiérarchies », fait partie des matériaux de prédilection du mouvement Art Nouveau.
Il est capable de développer un décor cohérent et complet d’une grande qualité, répondant aux styles propres de chaque construction auquelle il participe.
« La femme au singe », en grès et en bronze, d’une hauteur de184 cm, chef-d’œuvre incontesté de la statuaire Art Nouveau, en est la plus belle preuve et, conservé au musée du Petit Palais à Paris depuis 1908.

En 1906, il épouse Anna Von Oertzen, née Von Gottberg, sculptrice connue sous le nom d’Annie Avog.

En 1914, Camille Alaphillippe est mobilisé. Avant de prendre les armes, il désigne Annie Avog comme continuatrice de la Fontaine des Dames d’Antan en cas de décès.
Il est démobilisé en février 1919.
La guerre marque un tournant décisif dans la carrière du sculpteur : l’artiste se retire du milieu artistique parisien, la Fontaine n’est pas réalisée, et à en croire certaines sources, les origines allemandes d’Annie Avog contribuent au départ du couple. Ils quittent la France sans espoir de retour.
C’est en Algérie, territoire français depuis 1830, qu’ils vont trouver un lieu de repos à leur convenance. Le couple Alaphilippe ne mène pas une vie recluse à Alger, bien au contraire, la ville est propice à un nouveau départ de leurs carrières.
Il s’insère rapidement dans la vie artistique algéroise et participe à de nombreuses expositions et évènements.
Première exposition en 1921 au Salon de la Société des Artistes Algériens et Orientalistes sans interruption jusqu’en 1941.

Entre 1920 et 1941, diverses expositions tant au Maghreb, qu’à Paris et à l’étranger permettent le rayonnement de l’œuvre d’Annie Avog et Camille Alaphilippe à l’international. (Salons algérois, salon d’Automne, Salon du Franc à Alger, Exposition artistique de l’Afrique française, Salon des peintres et des sculpteurs d’aujourd’hui, …..)

Plusieurs œuvres de Camille Alaphilippe entrent dans les collections du musée national des Beaux-Arts d’Alger avant 1927.

Pendant cette période, les pouvoirs en place vont passer plusieurs commandes à Camille Alaphilippe. A travers elles, il est en charge de la conception de monuments destinés à ancrer de manière permanente la présence française sur le territoire algérien.

Le couple Avog-Alaphilippe disparaît à Alger après 1941, mystérieusement.

Bibliographie :

  • Florent Allemand – Mémoire de recherche – École du Louvre : « Camille Alaphilippe (Tours 1874 – Alger ? 1941 ?) Prix de Rome en 1898 – Parcours d’un sculpteur de l’Art Nouveau à l’Art Déco »
  • « Les sculptures sortent de leur réserve » catalogue de l’exposition du musée des Beaux-Arts de Tours, décembre 1988-avril1989

Rome – 1901
Pensionnaires de la Villa Médicis en 1901
Photo parue en mars 1933 dans « Lectures pour tous : Revue universelle et populaire illustrée » page 53
Alaphilippe est assis au sol, en bas à droite, coiffé d’un chapeau à bords large, un chien sur les genoux.